La sauvegarde des entreprises : Outil de prévention ou de traitement?
IDGAZZA Abderrahmane
Juriste d’affaires et fiscaliste
La loi 73-17 a modifié en profondeur le dispositif mise en place par la loi 15-95 « livre5 », même si les finalités du droit des entreprises demeurent inchangés. Comme hier, le sauvetage des entreprises est donc la continuation de son exploitation constitue le mot d’ordre du nouveau droit des entreprises en difficulté. Pour atteindre cet objectif, la loi ouvert et renforce les techniques de préventions en introduisant notamment une nouvelle procédure collective : la procédure du sauvegarde. Elle redéfinie les procédures de redressement et de liquidation judicaires, et prolonge l’élargissement le domaine du droit des entreprises en difficultés[1].
Inspiré de la procédure du Chapter 11 du droit fédéral américain[2], cette nouvelle procédure permet à toute entreprise qui n’est pas encore en cessation de paiement de se placer sous la protection de la justice en vue d’obtenir une solution judiciaire par la voie de l’adoption d’un plan dénommé un plan de sauvegarde. Ce plan est destiné à permettre un redressement anticipé de l’entreprise par ça réorganisation. Cette nouvelle procédure empreinte de nombreux traits de son régime juridique à l’ancienne procédure de redressement judiciaire. Comme elle, l’adoption de plan de sauvegarde est précédée d’une période observation dont le but d’établir un bilan de la situation économique de l’entreprise. De même, l’ouverture de sauvegarde emportera l’interdiction du paiement des créances intérieures, l’interruption des poursuites met aussi la continuation des contrats en cours. Cette procédure est ouverte sans discrimination à toute entreprise.
Les procédures de sauvegarde de redressement judicaires et de liquidation judicaire en un point commun d‘être une procédure collective, elles conduisent toutes trois à un traitement judicaire et non plus amiable des difficultés des entreprises[3]. Alors que l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire est obligatoirement subordonnée à la preuve d’une cessation de paiement de l’entreprise. Le bénéfice de la procédure de sauvegarde est quant à lui réservé aux entreprises qui éprouvent des difficultés mais qui sont cependant inbonis c.à.d. en mesure de faire face à leur passif exigibles au moyen de leur actif disponible.
Cette distinction s’explique essentiellement par la finalité de procédure de sauvegarde qui est de permettre un redressement anticipé[4] de l’entreprise par sa réorganisation sous l’autorité et le control du juge. De ce fait, l’ouverture d’une procédure de sauvegarde n’est envisageable qu’en amant d’une cessation de paiement.
À la différence des procédures de redressement et de liquidation judiciaires, la procédure de sauvegarde constitue une procédure collective de nature préventive, qui est destinée à faciliter la réorganisation de l’entreprise afin de permettre la poursuite de l’activité économique, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif.
Quels critères, distinguent-ils, la procédure de sauvegarde, en tant que moyen préventif et non de traitement ?
En répondant sur la problématique ci-dessus, nous essayerons d’exposer les critères permettant la démonstration de la nature préventive de la procédure de sauvegarde
1 : la situation financière de l’entreprise et son fonctionnement.
la situation financière de l’entreprise au jour du jugement d’ouverture conditionne directement le choix de la procédure applicable. Si l’entreprise éprouve des difficultés sans être pour autant en cessation des paiements, elle est alors éligible au bénéfice d’une procédure de sauvegarde.
A : l’absence de cessation des paiements : condition nécessaire à l’ouverture d’une procédure de sauvegarde judiciaire.
A la différence des procédures de redressement et de liquidation judiciaire ; la procédure de sauvegarde constitue une procédure collective de nature préventive[5], qui est destinée à faciliter la réorganisation de l’entreprise afin de permettre la poursuite de l’activité économique, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif. Aussi ; la procédure de sauvegarde n’est ouverte qu’aux entreprises,qui, sans être en état de cessation des paiements[6], éprouvent néanmoins des difficultés qu’elles ne sont pas en mesure de surmonter seules, c’est à dire sans l’aide d’une intervention judiciaire.
L’article 560 du code de commerce ne définit pas la nature des difficultés permettant à une entreprise de solliciter l’ouverture d’une procédure de sauvegarde. Compte tenu de ce silence, force est de conclure que tout type de difficultés peut être pris en compte.
Peu importe en effet leur nature, Peu importe aussi que ces difficultés aient des conséquences sur la poursuite de l’activité de l’entreprise. Dans un arrêt de principe dit ” cœur défense “, la chambre commerciale a ainsi jugé qu’en l’absence de précision, le code de commerce n’exige pas que les difficultés à l’origine d’une demande d’ouverture d’une procédure de sauvegarde aient pour une cause une difficulté affectant directement l’activité de l’entreprise et nécessitant sa réorganisation.
B : le pouvoir de gestion du chef de l’entreprise.
La reconnaissance de plein droit au débiteur du droit de gérer[7] l’entreprise est conditionnée. Le législateur n’a pas voulu laisser au débiteur toute la latitude pour demander le bénéfice de la procédure de sauvegarde, il redoutait l’abus du débiteur à vouloir saisir le juge dans le seul but de limiter ou de nuire aux intérêts légitimes de ses créanciers. Le législateur a voulu éviter l’utilisation détournée de cette procédure.
En cas de procédure de sauvegarde, l’administration de l’entreprise est assurée par le débiteur lui même. Le maintien en place du dirigeant est justifié, il sera anodin que le juge procède au bouleversement de la direction d’une entreprise qui n’est pas défaillante. De même, il nous paraît judicieux que le dirigeant continue à gérer l’entreprise puisqu’il a su traiter en amont les difficultés. Donc, toute initiative de lui ôter cette prérogative, sera réputée inopportune, voire fâcheuse. Lorsque l’on dit du dirigeant qu’il administre l’entreprise, cela à une autre signification que « le maintien en place du dirigeant » . Cela veut dire que le dirigeant ne peut être dessaisi de ses prérogatives de direction de l’entreprise.
Ce principe se justifie par la raison d’être de la procédure de sauvegarde, il s’agit d’une procédure préventive, destinée à anticiper la survenance d’une cessation des paiements. De fait, elle a un caractère nécessairement volontaire et ne peut donc être ouverte qu’à la seule demande du débiteur, compte tenu de l’ensemble de ces particularités, il est logique que le débiteur conserve la plénitude de son pouvoir de gestion.” exception des actes de dispositions et les actes d’exécution des dispositions du plan de sauvegarde “.
2 : Les attributions du Tribunal.
Avant de convertir la procédure de sauvegarde en redressement ou liquidation, la présence de la cessation des paiements est indispensable dont le président du tribunal de commerce dispos de larges pouvoirs.
A : le pouvoir de conversion de la procédure.
L’ article 564 du code de commerce ; s’il apparait après l’ouverture de la procédure de sauvegarde que l’entreprise était en cessation de paiements[8] à la date du jugement prononçant l’ouverture de ladite procédure , le tribunal constate la cessation de paiement , en fixe la date et prononce la conversion de la procédure de sauvegarde en redressement judiciaire ou liquidation judicaire .
Les conditions d’application de cette exception sont strictement entendues :
1 er condition : l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire sans cessation des paiements n’est possible que si le débiteur est déjà l’objet d’une procédure de sauvegarde. L’ouverture ab initio d’une procédure de redressement judiciaire sans cessation des paiements est donc impossible. Elle s’opère toujours par conversion.
2 e condition : la demande de conversion de la procédure de sauvegarde en une procédure de redressement judiciaire n’est recevable que si l’adoption d’un plan de sauvegarde est manifestement impossible et si la clôture de la procédure conduirait de manière certaine et à bref délai, à la cessation des paiements .il s’agit de deux conditions cumulatives dont la charge de la preuve incombe au débiteur.
B : La détermination de la date de la cessation des paiements
Le tribunal doit également fixer la date de la cessation des paiements, cette tache n’est pas facile, ce qui permet au juge de recourir à des instruments en vue de préciser la date de la cessation des paiements[9].
La date de la cessation des paiements est appréciée au jour où le tribunal statue et non au jour où il est saisi de la demande d’ouverture. Ce principe oblige le juge à tenir compte de l’évolution de la situation financière de l’entreprise en cours d’instance. Par conséquent, la régularisation d’un impayé ou l’octroi de facilités de caisse, entre la date où le juge est saisi et la date à laquelle il statue, l’oblige soit à refuser l’ouverture de la procédure, soit, en cas d’appel, à réformer le jugement d’ouverture.Pour permettre au président du tribunal de décider de la suite à donner, en toute connaissance de cause, la loi lui a reconnu un pouvoir d’information considérable. Le président du tribunal peut, nonobstant toute disposition contraire, obtenir communication le commissaire aux comptes, les administrations, les banques, les organismes public ou par toute autre personne des renseignements de nature à lui donner une exacte information sur la situation économique et financière de l’entreprise débitrice.
De même, l’absence d’explication ou d’explication insuffisante,permet au tribunal de se faire assister d’un expert comptable rémunéré par l’entreprise, sans que le secret professionnel puisse lui êtreopposé.
Conclusion.
Les réformes apportées par la loi de sauvegarde, ont pour objectif de perfectionner les mécanismes de prévention . Cependant, et dans le souci de renforcer la prévention des difficultés des entreprises ,l’adoption d’une nouvelle procédure dite « sauvegarde accélérée » ou « sauvegarde financière » sera nécessaire à fin de préserver la stabilité bancaire d’une part. Et d’une autre part , améliorer l’arsenal juridique du nouveau model du développement économique .
Bibliogrpahie :
FrancoisePérochon , AnaelleDonnette-Boissière , Entreprises en difficultés 8eed
Marie-Laure Couquelet , Enetreprises en difficulté , Instruments de paiement et de crédit 6eed Dalloz 2017 .
Deen GIBIRILA, Droit des entreprises en difficulté, Defrénois, éd., 2009.
André JACQUEMONT, Droit des entreprises en difficulté-la procédure de conciliation-Les procédures collectives de sauvegarde, redressement et liquidation judicaire, Litec, 6ème éd., 2011.
[1]J.Bonnard, Droit des entreprises en difficultés ,7eed, Hachette supérieur, coll. « les fondamentaux », 2016.
[2]J . Vallansan , Difficultés des entreprises , 6eed, LexisNexis,Coll « Letic Professionnels», 2012
[3]Ph, Pétel, Procédures Collectives , 8eed , Dalloz, coll « cours » , 2014
[4]C . Saint-Alan-Houin, « le projet de la loi sur la sauvegarde des entreprises : continuité, rupture ou retour en arrière .2005
[5]Ph.Roussel Galle «l’ouverture des procédures » , in « Dossier Réforme du droit des entreprises en difficulté » 2009 .
[6]C. Saint-alan-houin. « l’ouverture de la procédure de sauvegarde ». Rev,proc 2008
[7]M-H Monsèrie-Bon , « l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée et le droit des entreprises en difficultés » 2011 .
[8]G.Berthelot « la cessation des paiements , une notion fondamentale et perfectible » 2008 .
[9] J-L Courtier « la notion de cessation des paiements » , in Mélanges Jean-Pierre Sortais, 2002 .