Prescription et demeure entre souplesse et rigidité
L’obligation est un de lien de droit moyennant lequel le débiteur est tenu d’exécuter une obligation au profit du créancier, dont L’ensemble , des obligations sont régies par des principes directeurs adoptés par la théorie générale des obligations et des contrats.
L’inexécution de l’obligation met l’une des parties dans un état de demeure, qui signifie le retard.
Qu’il soit le débiteur ou le créancier en demeure, cet état est étroitement lié à la prescription. Sauf que le positionnement contractuel des parties se traduit par une différence quant à l’effet interruptif de la prescription.
L’interruption de la prescription provenait d’un acte du créancier ou d’un acte du débiteur.
Le créancier interrompt la prescription par certains actes qui manifestent sa volonté de se faire payer.
Il en est ainsi s’il fait une demande en justice même devant un juge incompétent, ou s’il signifie au débiteur un commandement (acte d’huissier) qui suppose l’existence d’un titre exécutoire, ou s’il procède à la saisie des biens du débiteur.
Le débiteur interrompt la prescription s’il reconnait l’existence de sa dette. Cette reconnaissance peut être expresse (en général par un acte écrit) ou tacite, c’est-à-dire s’induire des circonstances (par exemple (le débiteur règle les intérêts de sa dette).
Les deux situations de la demeure et les deux cas de moyens d’interruption de la prescription, après une lecture des articles 381 et 382 du Dahir formant Code des Obligations et des Contrats, présentent une différence majeure signée par une souplesse et rigidité, en ce qui concerne la réalisation de l’effet interruptif de la prescription.
En déduction de ce qui précède, comment l’effet interruptif de la prescription, est différent dans l’état de la demeure des parties aux contrats ?
L’analyse de la problématique ce dessus nécessitera l’étude de l’état de demeure du débiteur et son effet sur la prescription dans une première partie, et puis, dans la seconde, nous allons étudier l’état de la demeure du créancier et son effet interruptif de la prescription.
Partie 1 : la Demeure du débiteur et la prescription
« L’article 255 face à l’article 381 du D.O.C »
Les moyens d’interruption de la prescription sont divers et de multiples applications et qui sont régis d’une manière générale par le Dahir des obligations et des contrats, procédures civiles et de recouvrement forcé des créances publiques.
Tant que La mise en demeure est la manifestation de volonté du créancier qui exige le débiteur à exécuter les obligations qui lui sont dues. Elle résulte donc :
- D’une sommation. Il s’agit d’un acte d’huissier par lequel le créancier invite formellement le débiteur à s’exécuter. Les actes équivalents sont les commandements et les citations en justice.
- Le commandement est également un acte d’huissier ; lui aussi est une invitation à payer. Mais il est plus énergique que la sommation, car il suppose que le créancier possède déjà un titre exécutoire.
- La citation en justice. Elle aussi opère mise en demeure, car elle manifeste, sans équivoque, la volonté d’obtenir l’exécution. En règle générale, la citation en justice est, d’ailleurs, faite par un huissier. D’après la jurisprudence[1], la citation en justice opère mise en demeure, même si elle est faite devant un juge incompétent. En ce cas, bien entendu, le créancier doit recommencer son procès, en saisissant le tribunal réellement compétent, mais la mise en demeure aura déjà eu lieu dès la première citation en justice.
- L’avertissement du percepteur vaut lui aussi mise en demeure. La mise en demeure peut résulter d’une simple lettre recommandée, il en est ainsi lorsque le législateur l’a prévu.
- Il en est de même lorsque les parties en sont convenues par une clause du contrat. les parties peuvent même aller plus loin en stipulant que la simple échéance[2] vaut mise en demeure. Cependant, et en application du principe « Dies non interpellat pro homine » révèle que le seul retard dans l’exécution du contrat ne revêtant pas, à lui seul, un caractère coupable.
- La mise en demeure par acte d’avocat a pour effet d’interrompre la prescription. Malgré le silence d’un texte spécial régissant la matière, l’article 381 du code des obligations et des contrats venait dans un contexte plus général en édictant que toute demande en justice. Alors que l’avocat fait partie du corps judiciaire, sa demande introduite au procès produira bel et bien, un effet interruptif de la prescription. Dans le volet du droit comparé, la lettre d’avocat ne serait interruptive de prescription qu’après la réunion de certaines conditions. Elle devait intervenir au moment de l’émission de la mise en demeure. Cela justifie principalement par le fait que « c’est l’expéditeur qui est concerné par la prise de cours effective de l’interruption de la prescription[3] , en fin il faut noter qu’en cas de contestation , conformément aux règles de preuve de droit commun , c’est le créancier qui devra rapporter la preuve de la date de l’envoi [4] .
Finalement, on trouve que l’effet interruptif de la prescription se fait présenter automatiquement après une mise en demeure, cela se justifie par les finalités des obligations quant à leur exécution en vertu de la force obligatoire d’une part, et, d’une autre part, en vue de garantir la sécurité juridique des opérations contractuelles.
Partie 2 : Demeure du créancier et prescription
« l’article 270 et suivant vis-à-vis de l’article 382 du D.O.C ».
L’article 2240 du code civil français dispos que « la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription ». De son côté, le législateur civil Marocain avait édicté dans son article 382 « la prescription est également interrompue par tout acte par lequel le débiteur reconnait le droit de celui contre lequel avait commencé à prescrire ».
Cela signifie que les offres réelles suivies de consignation constituent une reconnaissance de dette.
La jurisprudence[5] décidait en effet que les offres réelles valaient reconnaissance de dette, logique technique, car, après tout, le débiteur était en droit de se libérer et s’en trouvait empêcher par le créancier.
Cependant, la réalisation des offres réelles suivies de consignation nécessite la réunion des conditions très strictes[6], voir lourdes sur le débiteur.
L’état de demeure du créancier constitue une condition principale dans ce cadre. L’article 270 du Dahir des obligations et des contrats prévoit le créancier est en demeure, dans le cas d’un refus d’accomplissement des obligations qui lui sont dues. Il est en demeure, lorsque les obligations ne peuvent être effectuées que si le créancier. Son inaction, silence ou absence constituent aussi, un état de demeure.
Sauf que, l’état de demeure du créancier ne libère point le débiteur. Ce dernier est obligé de faire une offre réelle suivie de consignation[7]. Cette procédure ne pourrait être réalisée qu’après des certaines conditions.
La première est relative à l’état de demeure analysée ci-dessus. Les autres sont liées :
- Aux parties : les offres doivent être faites à un créancier capable de recevoir ou à son représentant. Et par une personne capable de payer, et même par un tiers agissant au nom du débiteur.
- Certaines étaient relatives aux modalités de l’obligation payée, voir le terme doit être échu, s’il a été stipulé en faveur du créancier. Ensuite, que la condition, sous laquelle la dette a été contractée soit arrivée.
- Autres sont liées aux modalités de paiement, car les offres devraient être de la totalité de la somme exigible, et qu’elles soient faites dans le lieu stipulé dans le contrat. A défaut, à la personne du créancier ou même à l’audience.
- Lieu de l’offre, l’article 275 et 276 du D.O.C traitant d’une manière générale l’objet de la consignation et son lieu d’exécution, de son côté, l’article 277 présente les cas où le débiteur est dispensé de faire des offres.
L’analyse de l’article 382 du D.O.C fait preuve que l’effet interruptif de la prescription en faveur du débiteur est marqué par une procédure , plus ou moins abusive dans sa réalisation , par rapport à son rôle dans le droit des obligations et des contrats , ce qui permet de faire naitre un affaiblissement de la force obligatoire des contrats par voie de déséquilibre des obligations , la mauvaise foi , et par l’abus de droit .
En conclusion : Cette situation ne présente aucune utilité juridique, en raison que le débiteur, est considéré comme partie faible. Ce qui nécessite l’intervention du législateur à fin de réduire une lourdeur plus au moins préjudiciable aux intérêts du débiteur spécialement et de la sécurité juridique du droit des contrats généralement.
[1] Une décision récente semble s’éloigner des solutions traditionnelles , en déclarant que la mise en demeure peut résulter d’une lettre missive , dès lors qu’il en ressort une interpellation suffisante ( Civ , 3 , 31 mars 1971 : J C P ; 71 IV , 126 )
[2] Req .28 fév .1938 : Gaz , Pal . 1938 , 1 , 871 .
[3] Marchandise M , « l’interruption de la prescription libératoire par une lettre d’avocat », J.T n 6602 , 2015 / 2016
[4] F.LEDAN h »hh « l’acte d’avocat et bientôt l’effet interruptif de la prescription de la mise en demeure adressée par l’avocat » . La semaine fiscale , 2013 ; n 28
[5] Plus précisémment , Civ . 2e ; 1 févr 1995 n 93-13-756 : « suivant proces-verbal clair et précis d’offres réelles , les époux B …… avaient indiqué qu’ils n’avaient jamais refusé de régler la rente selon les modalités fixées dans l’acte notarié et qu’ils avaient effectué un autre versement » ce dont la cour d’appel avait pu déduire que cette reconnaissance sans réserve avait interrompu , conformément aux dispositions de l’article 2248 du code civil
[6] 1858 M.Mignot , v « contrat et obligations » offres de paiement et de consignation .
[7] Offres réelles , th ,dir A . COLIN , Paris , Giard et Brière , 1910 p ; 140 .